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Entretien avec Mme Assia Belhocine, Présidente de l’Association Endo -Algérie: « Notre objectif est de faire reconnaître l’endométriose comme maladie chronique »

A l’occasion de la célébration de la journée internationale de lutte contre l’endométriose le 28 mars de chaque année, Mme Assia Belhocine, présidente de l’association Endo -Algérie revient dans cet entretien sur cette maladie  peu connue et l’importance de la sensibilisation en milieu professionnel. Elle signale que « Depuis la naissance de notre association nous avons pu permettre à beaucoup de femmes et d’adolescentes de donner un nom à leurs douleurs qui durent depuis de longues années vivant dans un flou total »

Propos Recueillis

par Djamila Kourta

Vous avez organisé une journée de sensibilisation  à l’occasion de la célébration de la journée internationale de lutte contre l’endométriose  le 28 mars sous le slogan non à la douleur, en milieu professionnel précisement à BNP ParisBas el Djazair.  Pourquoi ce choix ?

En parallèle des actions de sensibilisation et d’information que mènent depuis un moment endo Algérie au profit du grand public, nous avons inscrit dans notre plan d’action la nécessité de sensibiliser sur cette maladie en milieu professionnel. En effet, beaucoup d’employeurs ne connaissent pas cette maladie et par conséquent méconnaissent l’impact qu’elle a sur la vie professionnelle de la salariée tant sur le plan psychologique que physique .
Les femmes atteintes d’endométriose sont, parfois, obligées de déposer des arrêts de maladie ou alors pour se rendre à des rendez-vous médicaux ou de se reposer sur les lieux de travail afin ne pas subir de perte de salaire. La qualité de vie au travail, de ces femmes ainsi que celles de leurs aidants, peut être fortement impactée. Des répercussions peuvent également exister sur le long terme :
Augmentation de la charge mentale et du stress, perte de confiance en soi, difficulté à rester concentrer sur les problématiques professionnelles etc.
L’objectif de ces actions de sensibilisation est celui d’améliorer la qualité de vie professionnelle de la femme souffrante , et d’encourager le dialogue qui  permettra aux deux parties (employé  et employeur) d’en tirer profit aisément . Les bénéfices de ces actions sont nombreux. Il s’agit de  renforcer la responsabilité sociétale des entreprises, renforcer l’égalité homme-femme, améliorer une couverture mutuelle, conserver les talents, ou encore améliorer la performance. Notre ambition future est celle d’une réelle prise en charge  par la médecine du travail  et apr conséquent la prise en compte  de la santé des femmes  par la législation du travail   leur offrant ainsi des conditions de travail  qui allégeraient leur situation de mal être physique et psychologique.

L’ endometrise touche de plus de plus de femmes en Algérie. Est ce qu elle bénéficie vraiment d’une prise en charge?

Il est difficile de parler de prise en charge de cette maladie dans notre pays dans la mesure où elle demeure encore peu connue.  C’est un sujet qui reste tabou à tous les niveaux, parler de la femme déjà en soi, constitue un sujet délicat. Notre objectif  justement est de de faire connaitre cette maladie sur tout le territoire national, à travers des actions de sensibilisation et d’information, même auprès des professionnels de la santé, qui parfois ne maitrisent pas suffisamment cette maladie. Je pense que qu’on sera en mesure de parler de prise en charge une fois que  l’information aura gagné du terrain sur tout le territoire national pas qu’au sein des foyers, mais aussi après la mise en route de notre plan de formation de femmes expertes pour la création de centres d’experts , ainsi que la formation des professionnels de la santé (sage femme, généraliste, spécialiste, radiologue).

En parallèle de tout cela certaines autorités institutionnelles notamment  la sécurité sociale, le ministère de la santé , de l’éducation et du travail , devront se joindre à nos efforts , afin de nous permettre un jour de  parler de réelle prise en charge notamment lorsque nous mettons le doigt sur l’infertilité , car 30 à 40 %  des femmes atteintes d’endométriose sont touchées par l’infertilité .

Comment votre association Endo Algérie entend porter cette lutte au plus haut niveauet impliquer tous ces acteurs?

Aujourd’hui endo Algérie s’est fixé plusieurs objectifs, dont les trois grands titres  sont les suivants : le premier étant de faire connaitre la maladie le plus possible notamment en milieu professionnel  et éducatif s’agissant des adolescentes. Depuis la naissance de notre association nous avons pu permettre à beaucoup de femmes et d’adolescentes de donner un nom à leurs douleurs qui durent depuis de longues années vivant dans un flou total.  Nous avons pu aussi permettre à certaines femmes de trouver l’origine de leur infertilité, et donc de changer carrément l’orientation médicale qui leur avait été préconisée. Il est plus facile de prendre en charge une jeune fille âgée  de 19 ans et qui découvre qu’elle est atteinte  d’endométriose que depuis peu, qu’une femme de 35 ans ne  découvrant sa maladie que 10 après, comme vous le savez la fertilité est ultimement liée à l’âge de la femme, donc plus jeune on découvre la maladie, plus les chances sont grandes . L’accompagnement psychologie de ses femmes est très important en parallèle de la prise en charge médicale , l’un ne va pas sans l’autre , sachant que l’endométriose provoque chez certaine un état dépressif plus que sévère , vivre de constantes douleurs pendant de longues années n’est guère chose aisée pour une femme qui doit assurer l’éducation de ses enfants , assurer ses responsabilités professionnelles , conjugales, sociales; scolaires .
Le deuxième :  la formation est un point crucial , je cite l’exemple des spécialistes, à ce sujet beaucoup ignorent que l’endométriose peut toucher d’autres organes , et ceci met souvent en porte à faux le diagnostic que l’on pose , c’est pour celà que la surspécialisation des spécialistes est une urgence pour pouvoir réduire cette errance de diagnostic  qui va parfois de 7 à 12 ans . Il y va de même que pour les radiologues.
Le troisième , et c’est celui qui vient au sommet de la pyramide , c’est celui de la prise en charge par la sécurité sociale, car notre ultime objectif c’est de faire reconnaitre la maladie comme chronique , ce qui réduira les coûts par rapport au différents traitements que le femmes devra prendre pour palier aux terribles conséquences de la maladie . Au final , toutes nos multiples actions visent uniquement à améliorer la qualité de vie de la femme qui se voit sévèrement altérée par une maladie qui demeure encore très complexe et peu connue .

D.K

 

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